29 juin 2006

Carrière et mutations

CAPA Hors classe : déclaration préalable du SNES-FSU

Monsieur Le Recteur,

Depuis l’an dernier, le ministère a instauré de nouveaux critères pour l’accès à la hors-classe contre l’avis unanime des organisations syndicales. Nous avons à maintes reprises dénoncé cette « nouvelle gestion des personnels » qui, au nom de l’individualisation des carrières, s’attaque aux droits collectifs des personnels. Loin de garantir à chaque fonctionnaire un examen équitable, ces réformes nous rendent individuellement plus vulnérables devant nos hiérarchies.

En outre, l’évaluation « au plus proche du terrain » vise surtout à faire adhérer chacun de manière contrainte aux projets institutionnels. Adaptabilité aux contraintes locales, « bonne volonté » à appliquer différentes injonctions, souplesse et serviabilité : nous dénonçons ces critères pour apprécier notre « manière de servir ».

Notre identité professionnelle est avant tout basée sur la transmission des savoirs disciplinaires. Nous refusons ces nouvelles pratiques qui décentrent en partie l’évaluation vers des tâches périphériques et mesurables aux dépens du travail de classe.

A ceux qui défendent le « mérite », nous rappelons que les parcours de carrière sont actuellement loin d’être uniformes ou indifférenciés. Entre une carrière au grand choix (parcourue en 20 ans) et une carrière à l’ancienneté (parcourue en 30 ans), la différence des gains cumulés peut atteindre 174 000 euros. Les effets de la notation sont bien réels.

Nous revendiquons au contraire la reconstruction de la grille indiciaire : l’indice du 11e échelon serait relevé à l’indice terminal de l’actuelle HC, ainsi intégrée à un déroulement complet de la carrière. Tous les collègues partiraient alors en retraite à l’indice 782. En plus de la nécessaire progression du pouvoir d’achat des actifs ou des futurs retraités, nos responsabilités professionnelles croissantes et l’implication dans l’exercice de nos missions légitiment pleinement cette revalorisation.

Dans l’immédiat, nous demandons des critères transparents, lisibles et opposables à tous. L’ancienneté de carrière doit rester un critère commun pour faire que chacun, à court ou moyen terme, puisse prétendre à la promotion. Les éléments de qualification individuelle (accès au corps par concours, bi-admissibilité, titres et diplômes) sont aussi à prendre en compte. Ces éléments de barème, éloignés des avis hiérarchiques potentiellement inéquitables et aléatoires, assurent une sécurité d’examen pour l’accès à la HC. Ils évitent de renforcer en fin de carrière des inégalités déjà révélées pour les promotions d’échelon.

En effet, en plus des distorsions anciennes entre disciplines, des notes pédagogiques sont mal étalées dans la grille cible pour certaines disciplines, des retards d’inspection sont courants pour d’autres. Les récentes promotions d’échelon ont une nouvelle fois démontré combien certaines disciplines étaient favorisées quand immanquablement d’autres étaient perdantes. Parce que nous sommes attachés à l’évaluation pédagogique, nous vous demandons une nouvelle fois, Monsieur le Recteur, de réunir un groupe de travail pour l’harmonisation et le suivi de la notation pédagogique.

Certes nous nous réjouissons que le nouveau calcul pour les contingents budgétaires de hors-classe soit favorable à notre Académie. Les possibilités de promotions passent en effet de 224 à 237. Mais d’une part, l’application du ratio, défini pour un an encore au niveau national, crée de lourdes disparités entre académies. D’autre part ce ratio pourrait à l’avenir être défini à la baisse dans notre Académie. Cet arbitrage, dont la responsabilité vous reviendra Monsieur Le Recteur, fera l’objet de toute notre attention.

Permettez-nous d’examiner maintenant un à un plusieurs points essentiels sur ces promotions.

Comme en 2005 et conformément aux consignes nationales de promouvoir ceux ayant la plus grande expérience, l’ensemble des promotions revient aux collègues du 11e échelon.

50 collègues sur les 141 exclus en 2005 sont rattrapés cette année. Seuls 120 étaient d’ailleurs encore en activité. Nous avons défendu ce dispositif transitoire pour rattraper les collègues malmenés par la mise en place des nouveaux critères en 2005. Nous vous demandons, Monsieur le Recteur, de maintenir ce rattrapage, que vous avez voulu pour 2006, et permettre ainsi l’an prochain de nouvelles promotions aux plus anciens dans la carrière.

L’ancienneté moyenne des promus dans le 11e échelon remonte ainsi de 2 ans en 2005 à 2 ans 6 mois. Cette augmentation constatée va pour nous dans le bon sens : rappelons que 3 ans dans le 11e sont nécessaires pour bénéficier du saut à l’indice 740. Avant ces 3 ans, le gain réalisé est minime. Le seuil des 3 ans dans le 11e échelon doit être barèmé ce qui est d’ailleurs le cas pour les agrégés : cela éviterait de nouveaux et inévitables retards de promotions dont seraient victimes des collègues tout aussi compétents mais dans une discipline au taux de promotion moins fort ou rarement inspectés.

La part des promus certifiés par liste d’aptitude fléchit légèrement (32% des promus contre 38% en 2005). Toutefois, la part des promus certifiés par concours reste bien inférieure à la part qu’ils occupent parmi les candidats. Nous demandons que le barème tienne compte des éléments de qualification individuelle comme l’accès au corps par concours, les titres et diplômes et la biadmissibilité. Nous demandons notamment que les carrières des certifiés biadmissibles, écrasées au moment du reclassement de biadmissible, soient rattrapées par un accès plus rapide à la hors-classe.

Les effets de discipline dénoncés en 2005 sont atténués cette année. En SES, histoire géographie, éducation musicale, documentation et sciences physiques, les avis exceptionnels attribués par les IPR permettent une évolution sensible du taux de promotion dans ces disciplines. Des disciplines restent sur-représentées (Eco gestion, STI), d’autres sont scandaleusement sous-représentées : en espagnol et arts plastiques le taux de promotion des candidats au 11e échelon est inférieur à 10 % pour un taux moyen de 25,7%. La nécessaire régulation n’a pas été menée dans ces 2 disciplines : 1 seul avis exceptionnel de l’IPR en espagnol pour 32 candidats au 11e échelon, 0 en arts plastiques pour 30 candidats. Ces 2 disciplines doivent impérativement être revues. La place faite aux disciplines à faible effectif devra aussi être reconsidérée (philosophie, langues rares).

Les collègues nommés dans le supérieur sont promus à la hauteur de leur part dans les candidats du 11e. En revanche, les collègues en poste au CNED, en CLM ou CLD semblent sous-représentés dans les promus. Pour certains ils sont oubliés par les notateurs, pour quelques autres un avis défavorable est donné.

Les effets d’établissements aussi dénoncés en 2005 s’estompent légèrement. Nous notons que les collègues en postes dans plusieurs lycées (Bréquigny, Dupuy de Lôme Lorient, lycée d’Auray) ont moins d’avis exceptionnel du chef d’établissement. Sauf à avoir un avis exceptionnel de l’IPR, ils ne peuvent être promus. Cette année, un minimum de 35/50 au titre des avis est en effet nécessaire pour une promotion.

Les femmes, sous-promues en 2005, sont sur-promues cette année : 28% des candidates du 11e échelon sont promues contre 22% chez les hommes du 11e. Ces taux étaient exactement inversés l’an dernier.

17 collègues du 11e ont un avis défavorable par le chef d’établissement. Nous demandons que les appréciations littérales soient portées à la connaissance de la CAPA et qu’au besoin ces avis soient levés. Nous pensons, entre autre, aux collègues en congé de maladie.

Une nouvelle fois, c’est bien la volonté de trier dans le 11e échelon qui marque ces promotions. En modifiant chaque année le classement des candidats, les collègues perdent une possible prévision des promotions pour leur fin de carrière. On installe de fait une insécurité favorable à la mise sous tutelle des fonctionnaires. Nous dénonçons cette nouvelle gestion des carrières et nous revendiquons le rétablissement des anciens critères.

Après les disparités et les injustices dénoncées l’an dernier, la régulation et le dispositif de rattrapage, tous deux supervisés par le rectorat, ont permis quelques « réparations ». Ces correctifs appliqués à la marge sont loin d’être suffisants et redressent parfois excessivement des situations. Par exemple, l’équilibre entre les disciplines, mesurée en partie par le taux de promotion discipline par discipline, n’est toujours pas obtenue et des collègues qui n’auront jamais démérité partiront malgré tout à la retraite sans la hors-classe. Nous aimerions d’ailleurs que le taux annuel des collègues certifiés partant à la retraite avec la hors-classe nous soit communiqué chaque année.

Ces correctifs que vous avez souhaités Monsieur le Recteur doivent être certes prorogés en 2007 mais mieux appréhendés et appliqués par les notateurs. Nous vous appelons par ailleurs à rétablir une bonification pour 3 ans dans le 11e échelon : cet élément de classement reste irréprochable et limiterait les besoins de régulation rectorale.

L’étude des candidats non promus ayant plus de 3 ans dans le 11e échelon met en évidence deux profils différents que nous vous demandons, Monsieur Le Recteur, d’examiner avec attention :

D’une part, 43 collègues ont une note pédagogique supérieure à 52/60. Aucun de ces collègues n’a obtenu l’avis exceptionnel de l’IPR malgré une note pédagogique élevée et une ancienneté de carrière importante. Sur ces 43 candidats, 15 sont en plus concernés par le dispositif de rattrapage des exclus 2005.

D’autre part, 65 collègues sont retraitables d’ici au 30/06/07. Leur sort doit impérativement être reconsidéré au vu notamment de leur note pédagogique ou de leur dernière inspection, certains n’ayant pas eu d’inspection depuis 20 ans.