Terminée ce 13 décembre, la COP 28 a été la conférence de l’ONU pour le climat aux multiples paradoxes et rebondissements.

Dès le début, il était très difficile de ne pas être sceptique quant à son organisation : la COP a eu lieu à Dubaï, ville aux projets climaticides délirants et première ville des Émirats Arabes Unis, principaux extracteurs de pétrole du monde. Le président de cette COP a été le patron de la compagnie nationale pétrolière émiratie : le Sultan al-Jaber. Tant de cynisme a attiré 2 500 lobbyistes des énergies fossiles en quête de l’opération de greenwashing la plus ambitieuse du monde.

En effet, de nombreuses ambitions extrêmement contradictoires étaient dans la tête de toutes les parties prenantes :
• Le premier enjeu est l’enjeu officiel : tracer une route de réduction des émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les accords de Paris, qui visaient à limiter le réchauffement climatique à +1,5 °C. Pour la première fois, la question de la sortie des énergies fossiles a été mise sur la table.
• Les Émirats Arabes Unis, et d’autres dirigeants invités tel que le dirigeant syrien Bachar al-Assad étaient en quête de reverdir et redorer leur image de grands pollueur et grands persécuteurs de populations civiles.
• Pour les lobbys : la double ambition, se vanter d’être acteurs de l’écologie dans une campagne de greenwashing, et éviter que la sortie des énergies fossiles n’apparaissent dans l’accord. Deux ambitions dont le but était de maximiser leurs profits le plus longtemps possible quelles qu’en soit les conséquences dans le monde.
De nombreux pays victimes du changement climatique, détruits par les tempêtes et les incendies, parfois même engloutis par la mer étaient invités à cette COP et se sont battus pour la justice... et pour leur survie.

Qu’en est-il sorti ? « Un accord historique », à en croire de nombreux politiques dans les médias. D’après eux la mention de « transition hors des énergies fossiles » a de quoi nous rendre heureux de l’accord. Les représentants des pays vulnérables devraient cesser de pleurer et devraient plutôt se réjouir comme leurs « amis » pétroliers !
Trêves de tromperies : la notion de « transition hors des énergies fossiles » est suffisamment floue pour inclure des projets technosolutionnistes, faire proliférer le nucléaire sans questionner son impact sur l’eau et les sols, et surtout ne contraindre personne. Les compagnies pétrolières peuvent prendre le temps qu’elles veulent pour « transitionner ». Ils arrêterons les touillettes en plastiques dans leurs machines à café et cela pourra être considéré comme une « transition »…

Résultat : les pays qui sont victimes du changement climatique tout en en étant pas responsables n’ont toujours aucun recours juridique pour demander des comptes. La question de la justice climatique, qui est une question à la fois sociale et écologique, n’a, sans surprise, pas été traitée équitablement aux Émirats Arabes Unis.

S’il y a bien une nouveauté positive dans cet accord, c’est qu’il s’agit de la première fois qu’une COP mentionne les « énergies fossiles » en parlant d’y mettre fin, même si aucune échéance n’est écrite. Il est possible que chaque nouveau projet ou investissement tourné vers les énergies fossiles soit plus facilement décrié, rendant les oppositions plus armées contre les entreprises climaticides. Enfin, lors de la COP 21 à Paris, le monde avançait vers un réchauffement de + 4°C d’ici 2050. Depuis l’accord de Paris, on se tourne plutôt vers + 3°C. C’est bien au-delà du +1,5 °C mentionné par cet accord, mais il se peut, entre autres, que cet engagement ait eu un effet positif par rapport aux dynamiques antérieures. Espérons que cet accord de Dubaï produise un effet positif, mais il ne sera certainement pas à la hauteur des enjeux.

En effet, c’est bien d’une « sortie des énergies fossiles » dont le monde a besoin. C’est ce terme de « sortie » que les organisations des pays exportateurs de pétrole (OPEC) ont ardemment combattu. En le remplaçant par « transition », nous perdons un temps précieux. Ce temps coûte des vies  : les vies des habitants du Sud, les vies des personnes les plus précaires du Nord.

Ce n’est pas avec cette COP 28 que nous nous montrerons digne des enjeux de survie de l’humanité. Mieux que les pauvres engagements de Dubaï, il est toujours possible d’agir pour une ambition supérieure : agir pour la justice envers les personnes les plus vulnérables et agir pour le maintien de l’habitabilité de notre planète.