Un groupe de travail concernant le suivi de la réforme du lycée et la situation de la voie professionnelle se tenait ce mardi 21 mars au Rectorat. Ce bilan, demandé chaque année par la FSU, permet de mesurer l’impact des réformes Blanquer. Le Rectorat a choisi cette année d’élargir le suivi à l’apprentissage.
Le groupe de travail était piloté par Vincent Larzul, Secrétaire Général Adjoint de l’Académie en charge de l’organisation scolaire.
Camille Dappoigny, conseillère à la Pédagogie auprès du Recteur, a commencé par un rapide point sur les taux de poursuite d’étude dans le supérieur, assez semblables aux niveaux académique et national. Pour Rennes, 48 % des bacheliers professionnels poursuivent dans le supérieur, contre 80 % de bacheliers technologiques et 97 % des bacheliers généraux.
Voie générale : des choix toujours plus genrés et socialement marqués
Dans une académie où les établissements limitent de moins en moins les choix de spécialité à une carte de combinaisons figées, le nombre moyen de triplettes de spécialité continue à augmenter. Il était de 36,5 triplettes à la rentrée 2022, contre 28 trois années plus tôt.
Ces choix se font depuis 4 ans au détriment des spécialités scientifiques, même si les taux semblent se stabiliser cette année. Le choix de triplettes purement scientifiques continue à diminuer en première : seuls 30 % des élèves le font en 2023, contre 39 % en 2019 (et 50 % en 2018, avec la série S). En première générale, 64 % des élèves ont pris la spécialité mathématiques à la rentrée 2022. Cela représente une baisse de plus de 6 points en 4 ans, et de près de 30 points en comparaison avec le système précédent et la coexistence des séries S et ES, et L avec option mathématiques. Ce phénomène s’amplifie lorsqu’on regarde les spécialités conservées en terminale.
On constate par contre une montée en puissance de spécialités nouvelles : LLCE anglais, avec sa variante Monde contemporain (+10 % d’effectifs en 4 ans), HLP (+ 20 %), ou encore NSI (+ 35 %).
Mais ces évolutions sont à observer au prisme du genre et des professions et catégories socio-professionnelles (PCS) des parents.
Ainsi, seules 32 % des filles choisissent la Physique-chimie en première, contre 52 % des garçons. Le pourcentage de filles en informatique (spécialité NSI) ou Sciences de l’ingénieure reste très faible, et a poursuivi sa baisse à la rentrée 2022. Selon le Rectorat, ce qui s’observe pour l’orientation des filles en sciences et techniques se joue néanmoins déjà avant le lycée.
A contrario, les PCS très favorisées sont sur-représentées dans les spécialités mathématiques et physique-chimie, tandis que la LLCE et HLP accueillent les élèves aux profils sociaux les plus défavorisés. Ce phénomène n’est absolument pas enrayé et s’accentue depuis 4 ans. Il est d’ailleurs tout autant marqué lorsqu’il s’agit du choix des spécialités à conserver en terminale.
Spécialités et épreuves de baccalauréat
La FSU a tenu à aborder en réunion la question des notes aux épreuves finales de spécialité, qui était absente du diaporama proposé par le Rectorat. Nous avons en effet pris connaissance par ailleurs des importants écarts de notation lors de la session 2022 du baccalauréat, qui ont abouti à une amplitude de 6 points entre les différentes moyennes académiques (de 11/20 à 17/20 selon la spécialité). Le format des épreuves et la notation qui en découle sont à ce jour en défaveur des spécialités de sciences humaines. Cela semble donc renforcer les écarts liés aux choix de spécialités selon les indicateurs sociaux, ce que nous a confirmé Camille Dappoigny. Elle a d’ailleurs indiqué que cela constituait un sujet de travail important pour les équipes de l’inspection pédagogique régionale, qui ne peut se résoudre que par de l’harmonisation.
La FSU a rappelé l’importance du sujet, à l’heure où les notes d’épreuves vont pour la première fois être remontées et servir de marqueur de recrutement pour les établissements du supérieur.
Les services de l’académie ont interrogé 400 élèves d’un lycée autour de la construction de leur choix de spécialités. Il en ressort un certain nombre de données : l’évolution de la temporalité dans la construction de ce choix, les regrets importants constatés en première, les mécanismes de territoire, et l’importance de la confiance en soi, marqueur important selon le genre et les PCS des parents.
Poursuite d’études
Le responsable de la Délégation régionale académique à l’information et à l’orientation (DRAIO), Pascal Brasselet a ensuite abordé la poursuite d’études des élèves de série générale.
Il a confirmé que sauf filières très spécifiques, comme les classes préparatoires aux grandes écoles, la très grande majorité des filières du supérieur recrutait désormais sur une diversité importante de binômes de spécialité. Il a rappelé que nombre d’entre elles recrutaient désormais sans mathématiques.
Nous avons demandé ce qu’il en était pour le recrutement en IUT, et notamment quelle était la place à accorder au choix de l’option « mathématiques complémentaires ». Nombre de collègues s’interrogent encore sur la possibilité de ne pas conserver la spécialité au profit de l’option pour les filières ayant un profil scientifique prononcé. M. Brasselet nous a affirmé que ses échanges avec les IUT confirmaient que « la spécialité mathématique n’est absolument pas nécessaire », mais n’était pas en mesure de nous l’illustrer dans les statistiques de recrutement. Il s’est donc engagé à se pencher sur cette question et à revenir vers nous.
Il a aussi indiqué que certains choix gagneraient à être rappelés aux élèves. Ainsi, le taux d’élèves recrutés avec spécialité Sciences de l’Ingénieur par l’INSA est supérieur au poids de la spécialité dans l’académie.
Le taux de réorientation en L1 est à ce jour de 18 %.
Séries technologiques : du mieux
L’effondrement des effectifs constaté ces dernières années en STI2D et STL semble avoir été stoppé cette année, après un gros travail sur l’ensemble de l’académie. Si le nombre d’élèves en STI2D est en baisse de 15 % sur les 4 dernières années, on a pu observer avec soulagement un bon de 10 % pour la rentrée 2022.
Les recrutements dans le supérieur restent sur la même dynamique que l’an passé pour les différentes séries. Le taux de poursuite d’étude est toujours très important en STL, ST2S et STI2D, puisqu’il concerne 78 à 88 % sur des filières intégrées à Parcoursup. Ce taux s’effondre à 66 % en STMG, dont l’effectif global continue à grimper dans l’académie, ce qui inquiète les services du Rectorat. En incluant les départs vers l’apprentissage, le taux de poursuite monte à 80 %, mais cela montre que près d’un élève de STMG sur cinq disparaît des radars dans le supérieur.
Nous avons interrogé le DRAIO sur les taux de changement d’établissement après la seconde, ce qui freine souvent les familles dans le choix de séries technologiques. M. Brasselet doit là aussi revenir vers nous.
Voie professionnelle
La doyenne des IEN du 2d degré, Laurence Lechat, a ensuite abordé la situation de la voie professionnelle. Elle a rappelé que les effectifs restaient relativement stable à la rentrée 2022, avec près de 30 000 élèves dans l’académie.
Après avoir présenté les résultats aux tests de positionnement en numératie et en littératie, puis fait un rapide point sur la réforme à venir de la voie professionnelle, Mme Lechat et M. Brasselet ont présenté les poursuites d’études.
Les statistiques présentées ne comportaient aucune comparaison pluri-annuelle, mais distinguaient élèves sous statut scolaire et apprentis.
Un focus était proposé sur les élèves de CAP, pour celles et ceux qui obtiennent leur diplôme. La FSU a rappelé que 90 % des élèves sous statut scolaire étaient concernés, mais que seuls 60 % des apprentis restaient jusqu’au terme de la formation, ce qui impacte la lecture des statistiques proposées.
À l’issue de l’obtention du CAP, un peu plus d’un élève sur deux sort du système de formation initiale (52 % des diplômés sous statut scolaire, 56 % des apprentis diplômés).
La poursuite d’étude en Bac Pro est nettement plus forte chez les élèves sous statut scolaire. Ainsi, 30 % d’entre eux choisissent cette voie, dont un tiers en alternance. Pour les apprentis en bac pro, 20 % poursuivent en BTS, et tous en alternance. 15 % des élèves poursuivent vers un autre CAP, quel que soit leur statut.
Concernant la poursuite d’étude dans le supérieur pour les élèves de la voie professionnelle, l’impact des PCS des parents est très importante. Ainsi, 8,6 % enfants d’ouvriers & sans emplois choisissent de poursuivre en apprentissage dans le supérieur, contre 12,2 % cadres et enseignants.
Apprentissage en Bretagne
La dernière partie du Groupe de Travail était consacrée aux filières d’apprentissage en Bretagne, et notamment au réseau des GRETA-CFA de l’Éducation Nationale. C’est Allison Baugin, Conseillère en Formation auprès du DRAFPIC, qui assurait la présentation.
À ce jour 2800 CFA (6 000 sites de formation) existent en France, contre 1000 en 2019. Cette hausse est à relativiser car certains réseaux se sont éclatés. Le volume total d’apprentis dans le pays était de 837 000 en 2022, soit une hausse de 14 % par rapport à 2021. Attention néanmoins, la comptabilisation sur l’année civile mélange des cohortes 2021-2022 et 2022-2023, ce qui décompte des apprentis sortis en juin et d’autres rentrés en septembre. Le réseau des GRETA-CFA de l’Éducation Nationale pèse environ pour 10 % de la formation.
En Bretagne, les 154 CFA (38 en 2019) ont vu leurs effectifs bondir de 20 000 apprentis à près du double en 4 ans. Le réseau GRETA-CFA, assurait 202 formations à la rentrée 2022 (+32 par rapport à 2021), dont 90,5 % de diplômes EN, pour 1088 apprentis (+11,7 %). Un tiers de ces apprentis étaient en formation mixte avec élèves sous statuts scolaire en lycée, répartis dans près de 60 % des formations. A contrario, seuls 46 formations se font en groupes dédiés, mais absorbent 56 % des effectifs.
Près d’un apprenti sur deux prépare un BTS, un tiers un baccalauréat professionnel et 15 % de CAP (le reste, un peu plus de 3,5 %, étant des formations post-BTS). Les diplômes pré-bac sont en forte hausse. Les formations concernent majoritairement le bâtiment (41 %) et l’industrie (34 % des effectifs), et 10 établissements accueillent 53 % des effectifs (à commencer par les lycées Colbert à Lorient, Mendès France à Rennes, et du bâtiment à Pleyben).
La doyenne des IEN du 2d degré a conclu en présentant les résultats de l’enquête Inserjeunes sur l’insertion deux ans après la sortie d’études. Les données présentées concernaient des élèves sortis en 2018 et 2019. Constat : taux d’emploi parmi les sortants à 70 % pour les BTS, contre 45 % pour les CAP et 58 % pour les Bac Pro. Pour l’insertion des apprentis, les taux sont nettement supérieurs (69 % en CAP, 79 % en BTS). La FSU a relativisé ces écarts, rappelant que parmi les apprentis, une partie non négligeable revenait après une première expérience professionnelle, ce qui favorisait un retour rapide vers l’emploi.
Le groupe de travail s’est achevé au bout de 3h d’échanges.