• L’insistance sur le monde rural est dans la ligne d’un nationalisme fondé sur la terre et sur le monde paysan aux valeurs ’’solides’’ et ’’authentiques’’, car « la terre ne ment pas ». D’où le discours sur la France périphérique victime de la ’’désertification’’, l’abandon des services publics, l’appauvrissement des petites villes à travers la désindustrialisation. Ce constat est exact, mais il sert ici à cliver la société française entre Français authentiques et assistés des zones urbaines et à condamner l’extrême métropolisation du territoire, la mondialisation qui se ferait au profit des urbains ’’bobos’’, cadres, intellectuels cosmopolites, geeks...

• Le conservatisme social, le pays a besoin d’ordre, de discipline et de stabilité pour prospérer. Cela explique le discours sur la ’’valeur travail’’, le français qui travaille et que la fiscalité dépouille de son revenu, la dénonciation de l’assistanat. Mais aussi la collaboration nécessaire entre salariés et patronat (réminiscence du corporatisme pétainiste). Le conservatisme autoritaire explique aussi l’attachement aux valeurs du patriarcat, de la famille traditionnelle même si la prudence impose à Marine Le Pen une certaine modération sur le sujet.

• L’antisémitisme est une valeur cardinale du pétainisme. Or si aujourd’hui l’antisémitisme est dénoncé par le RN, il existe en bruit de fond à travers les actes et écrits de personnalités qualifiées d’ ’’intellectuels du mouvement’’. Néanmoins c’est le tropisme anti-immigration qui domine, le racisme anti-maghrébin, la théorisation du grand remplacement, la préférence nationale. L’habileté du RN, c’est la récupération du concept de laïcité républicaine pour dénoncer le poids supposé dangereux et mortifère de l’Islam dans la société française et du communautarisme.

• Seul aspect du pétainisme qui n’est pas repris par le RN : l’antiparlementarisme et la dénonciation du multipartisme. Au contraire le groupe parlementaire RN a joué les députés modèles, respectueux des conventions et des règles constitutionnelles. Il est évident qu’en 2024, on ne peut plus remettre en question le modèle démocratique. Le RN joue néanmoins du peuple, forcément intègre, contre les élites technocratiques, contre le ’’système’’, peuple auquel on donnerait la parole directe par le référendum.

Les analogies sont donc nombreuses entre la rhétorique de l’extrême droite des années 30’ et 40’ et le discours sous-jacent du Rassemblement National, certes à bas bruit et à mots prudents. Porter au pouvoir le RN, c’est à coup sûr ouvrir la voie à une vision réactionnaire de la société.