12 novembre 2019

Sections départementales

Le ’’trou’’ inventé de la Sécurité sociale

Le Parlement vient de voter le budget de la Sécurité sociale pour 2020 avec un déficit de 3,8 mds € (5,1 mds si on intègre le Fonds de solidarité Vieillesse), et voilà donc le retour du « trou de la Sécu’ » annoncé à grand fracas dans tous les médias. Cela ne représente pourtant qu’à peine 1% du budget total de la Sécurité sociale, 0.2% du PIB, 5.4% du déficit global de l’Etat (qui lui pèse 93 mds €).

Mais le déficit en question est une construction  : l’Etat a décidé de baisser les recettes de la Sécurité sociale par les mesures du CICE (allègement, voire exonération des cotisations sociales patronales) et de la loi PACTE (suppression du forfait social sur l’intéressement et la participation dans les PME) ; auxquelles s’ajoutent les mesures ’’Gilets jaunes’’ (exonération de cotisations sur les heures supplémentaires et sur la prime d’entreprise de 1000 €).
Depuis une loi Weil, il était admis que l’Etat compense les mesures d’exonération et le manque à gagner pour la Sécurité sociale. Cette année, le gouvernement a décidé qu’il n’en serait rien, le budget de la Sécurité sociale assume donc les dépenses liées aux décisions de politique économique du gouvernement, ce qui crée de fait une confusion illégitime entre budget Sécurité sociale géré en théorie depuis 1945 par les partenaires sociaux et budget de l’Etat. Désormais la SS n’appartient plus à ses cotisants et bénéficiaires, mais à l’Etat et au pouvoir politique.
Il n’y a donc pas dérapage des comptes sociaux, mais la volonté évidente et assumée de creuser le déficit et casser la gestion de la Sécurité sociale.
D’ailleurs ce déficit, plus ou moins semblable d’une année sur l’autre, engendre une dette qui ne sera pas payée par nos enfants, contrairement à ce qui est constamment proclamé, puisque les taux d’intérêt des emprunts jusqu’à 15 ans émis par la France sont négatifs ! Le pays s’enrichit en s’endettant... Au lieu de profiter de la conjoncture pour investir et notamment dans la santé, les Cassandre de service théorisent sur la nécessité de l’austérité.
La réforme des retraites qui consiste à maintenir à toute force la masse des pensions à 14% du PIB alors que le nombre de retraités va augmenter, entre dans cette logique : faire croire que la France est en déficit structurel et n’a plus les moyens de la solidarité ni de l’égalité sociale. Donc appauvrir la Sécurité sociale, baisser encore et toujours les dépenses sociales pour mieux réserver les profits économiques aux plus riches. Les plus riches dont les revenus et le patrimoine ont depuis 2008 augmenté 7 fois plus vite que ceux de la population commune.

Patrick Tarroux