La Droite au pouvoir présente sans relâche les Français comme des paresseux qui ne travaillent pas assez, sont improductifs, rêvent d’oisiveté. Ce discours est mensonger, il s’appuie sur des comparaisons internationales approximatives souvent biaisées et déconnectées.

Le taux d’emploi serait trop faible, le nombre d’heures travaillées insuffisant (ah ! les 35 heures...), la durée d’activité dans l’existence beaucoup trop courte. On nous dit que si le taux d’activité était celui de l’Allemagne (79,8% au lieu de 73,9% en France, en 2023), nous aurions 2,8 millions d’actifs en plus, donc un PIB plus élevé, des recettes fiscales en hausse. Sauf que ce ne sont pas les salarié.e.s qui créent les emplois, mais les entreprises et accessoirement l’Etat, qu’elles et il passent donc à l’action.
En France, les jeunes, même diplômé.e.s sont beaucoup moins en emploi, parce que les entreprises ne les sollicitent pas. Aussi parce que la structure démographique joue : les moins de 20 ans représentent 22,6% de la population contre 17,4% en Allemagne. Plus nombreux/ses, il leur est donc plus difficile de s’insérer sur le marché du travail.
A l’opposé de la pyramide des âges, le taux d’emploi des plus de 60 ans, pourtant en hausse, n’est que de 45% contre 60% ailleurs en Europe. Mais c’est en grande partie parce que les ’’seniors’’ sont évincé.e.s des entreprises, parce que les conditions de travail sont plus dures en France et contraignent aux départs précoces (retraites anticipées, invalidité, épuisement au travail).

Les comparaisons internationales sont souvent biaisées, elles ne tiennent pas compte de l’histoire, de la structure sociale et entraînent de faux raisonnements. Ainsi, le nombre d’heures travaillées rapporté à la population (664 h/an/hab en 2023 contre 729 en Allemagne) est sujet à caution, car si la population est plus jeune (natalité élevée) et/ou plus âgée (forte espérance de vie) — c’est le cas de la France — alors en toute logique le nombre d’heures travaillées par habitant est plus faible (sauf à faire travailler les enfants ou éliminer les personnes âgées...). Or si on calcule le travail effectif accompli par les personnes réellement en emploi (salarié.e.s : en moyenne 38,9 h/semaine, et indépendants : 2225 h/an en 2022), on obtient une moyenne de 1604 h/an supérieure à celle de l’Allemagne avec 1553 h/an.

Les Français.e.s ne sont pas paresseux, ils et elles travaillent autant que leurs voisins. D’ailleurs le taux d’activité a augmenté depuis 2021 : baisse du chômage, développement de l’apprentissage, hausse de l’âge des retraites. Le problème de notre économie est plutôt dans la baisse actuelle de la productivité. La faute au choix conjoint de l’Etat et du capital, qui ont priorisé la baisse du coût du travail (salaires réduits, exonération de cotisations sociales, baisse de la fiscalité), la désindustrialisation, notamment de la haute technologie, le recul de l’investissement productif. Ce choix a été acté au profit d’une économie tertiarisée basée sur de nombreux emplois de services peu productifs, peu qualifiés et ubérisés, de temps partiels non choisis, le tout fondé sur un ’’management’’ autoritaire et aliénant. Il faut au contraire investir dans l’éducation, la formation, la recherche, les industries vertes qui puissent nous sortir de l’impasse écologique et répondre aux enjeux de demain.

PS : les données sont tirées de 2 notes de mars 2025 du CAE (Conseil d’analyse économique) et de Rexecode (think tank libéral proche du patronat) et d’articles d’Alternatives Économiques.