La réforme du lycée se précise et entre dans sa phase de réalisation. Une réalisation précipitée, puisque le projet final sera présenté en conseil des ministres le 14 février après une concertation express. Et tout cela pour une application à la classe de seconde dès septembre 2018 et le nouveau bac en juin 2021.
Le nouvel examen pose deux séries de problèmes, sur le fond et sur la mise en œuvre :
La philosophie de la réforme ne nous convient pas :
– L’individualisation des parcours renvoie les élèves et les familles à leur responsabilité propre dans la réussite ou l’échec scolaire, chacun construit son parcours dans l’ignorance du voisin ; la classe, le groupe de pairs ne font plus sens. Et puis l’esprit général de la réforme interdit le droit à l’erreur, il faut se formater dès la seconde, choisir sa case, ne pas se tromper et réussir sa licence en trois ans.
– L’introduction du contrôle continu pour 40% de la note du baccalauréat, évidemment va créer des disparités de valeur de l’examen d’un établissement à l’autre. D’autant que les lycées pourront proposer des options et couples de ’’majeures’’ en vertu de leur autonomie de gestion.
– Le bac ne suffira plus pour accéder à l’enseignement supérieur, on le voit avec la mise en place de Parcoursup’ avec ses critères, la lettre de motivation et le projet de formation qui sont sans doute appelés à prendre plus d’importance dans le temps.
– Les filières sont supprimées, pour autant en quoi le fossé entre majeures ’’nobles’’ (les enseignements scientifiques) et les autres sera-t-il réduit ? Sur les 9 couples de ’’majeures’’ proposés, les Maths sont citées 4 fois (9 fois l’ensemble des disciplines scientifiques), les Lettres et SES 2 fois... Alors même qu’une majorité de lycéens s’inscrit à l’université dans les filières Lettres-Langues-Sc. Humaines et sociales.
Dans la pratique, la promesse d’une ’’usine à gaz’’ :
– Comment vont s’organiser les classes ? Concilier l’esprit de la réforme qui individualise les parcours et la nécessité d’organiser les emplois du temps et les classes ?
– L’organisation des cours en semestres va perturber l’organisation pédagogique des collègues, le rapport parle de variation de services de 16 à 20H d’un semestre à l’autre (dans les faits avec les heures sup’ plutôt de 16/17H à 20/22H). Et lors du semestre moins chargé, ne sera-t-on pas tenté d’imposer des taches nouvelles ?
– Le recul important des horaires disciplinaires (moins 3 à 5H suivant les situations) va entraîner la suppression à terme de 20 000 postes, une aubaine pour le budget. Mais croit-on ainsi mieux préparer les lycéens à de futures études en réduisant leur temps de présence dans l’établissement et leur imprégnation aux savoirs et aux pratiques pédagogiques ?
– La réorganisation des enseignements va nécessiter une refonte des programmes, comment va-t-on concilier et harmoniser les programmes des disciplines du tronc commun et ceux des matières d’approfondissement et de complément (majeures et mineures) ?
– Le ’’grand oral’’ a son intérêt certes, mais alors pourquoi faire disparaître les TPE ? Dans quelles conditions sera-t-il préparé, selon quelles modalités ? Puisqu’il n’y a pas de volume horaire consacré ni de séquences en co-intervention. Il est à craindre que l’oral soit préparé individuellement sur un sujet choisi par l’élève renvoyé encore une fois à sa responsabilité et à son contexte familial.
Rien n’est dit non plus sur les heures à effectifs réduits, la possibilité de travail en équipes, le rôle central du CDI.
– Que range-t-on dans les ’’heures d’accompagnement’’ (2H en seconde, 3H dans le cycle terminal) ? On perçoit surtout un temps consacré à l’orientation et au choix du parcours professionnel animé par des professeurs ayant reçu une certification, vaguement encadrés par des PsyEN dont le rôle apparaît de plus en plus évasif – 2 citations seulement sur les 65 pages du rapport !
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