Dans la bataille idéologique qui se joue entre libéralisme et volonté de régulation du système économique, les think tanks libéraux ont une part prépondérante : Terra Nova, IFRAP, Fondapol et le plus puissant, l’Institut Montaigne constituent des réseaux d’experts, d’entrepreneurs, de hauts fonctionnaires et de politiciens, et à l’aide de gros moyens financiers élaborent des banques d’analyses, d’études et de rapports qui visent à influencer le travail législatif et à peser sur les décisions gouvernementales.
L’Institut Montaigne a été fondé en 2000 par le patron du géant de l’assurance AXA (100 Mds € de Ch.A) Claude Bébéar (par ailleurs aussi financeur de ’’La Manif pour Tous’’) et aujourd’hui présidé par Henri de Castries (successeur de Bébéar à AXA) et dirigé par Laurent Bigorgne (proche d’E. Macron et rédacteur de ses discours lors de la campagne présidentielle). L’institut est financé par des dons d’entreprises privées, mais déductibles de leurs impôts (AXA, BNP Paribas, Bank of America, Dassault, Suez...) à hauteur de 4,3 M € (en 2017).
Depuis sa création l’institut a émis 202 publications à l’encontre des décideurs publics (depuis Sarkozy à Macron en passant par Hollande). Toutes, sous couvert d’analyses objectives, rationnelles et rigoureuses, visent à prôner la réduction des dépenses publiques, la réforme de la fonction publique et du code du travail, la hausse du temps de travail et le durcissement des conditions d’indemnité des chômeurs, la réduction des aides sociales et la fin de leur caractère ’’universel’’ (selon le principe : ’’l’équité plutôt que l’égalité’’). On peut constater sans peine que ses recommandations sont appliquées avec zèle par le gouvernement Macron-Philippe.
Un domaine où l’institut s’évertue à imposer ses vues, c’est le système éducatif via l’annexe créée par Claude Bébéar , L. Bigorgne et J. M. Blanquer, ’’Agir pour l’Ecole’’ – association elle-même liée à ’’Teach for France’’, émanation de l’officine américaine ’’Teach for all’’ - et où on retrouve L. Bigorgne, Emmanuelle Wargon ou Olivier Duhamel. ’’Agir pour l’Ecole’’, producteur des ouvrages de Blanquer, L’Ecole de la Vie, L’Ecole de Demain, L’Ecole de la confiance, milite pour une transformation du système éducatif inspirée des neurosciences et fondée sur 4 principes : autorité, autonomie, fondamentaux et hiérarchisation.
Autorité des directeurs d’école et chefs d’établissement sur les pratiques pédagogiques et le contrôle des enseignants, autorité appuyée sur un mode de gestion qui assurent leur autonomie (choix des enseignants, élaboration des EdT et horaires disciplinaires...).
Les fondamentaux autour de 2 disciplines : maths et français.
Hiérarchisation des établissements par leur mise en concurrence et leur adaptation aux besoins des territoires. Hiérarchisation des enseignements, des élèves (groupes de compétence, tri précoce, essor de l’apprentissage...).
’’Agir pour l’Ecole’’ a mis au point des méthodes notamment dans l’apprentissage de l’écriture et de la lecture fortement contestées par de nombreux spécialistes qui accusent l’association de défendre des choix idéologiques derrière des arguments d’apparence scientifique et une culture systématique de l’évaluation et du test. Le plus grave, c’est qu’il s’agit toujours de ramener les difficultés scolaires à des explications cognitives ou neuropsychologiques à l’exclusion de toute cause d’ordre socio-économique. Tout n’est donc question que de bonnes pratiques et d’organisation de la classe, d’application zélée des protocoles par les professeurs.
Ce qui permet ainsi de justifier la réduction des budgets et la mise au pas et dans la norme des enseignants, soumis au respect de l’autorité et l’obligation de réserve.
Ci-joint le dossier de presse établi par ATTAC Rennes et le Collectif 35 contre les réformes Blanquer