Le budget annoncé ces derniers jours par le gouvernement est présenté par les éditorialistes en place comme ’’keynésien’’ du fait des mesures dites « gilets jaunes », notamment les baisses d’impôts accordées aux classes moyennes et populaires. Rien de plus faux et trompeur.
Car ces ’’cadeaux’’ fiscaux sont payés par les mêmes qui devraient en bénéficier, du fait de la baisse des dépenses et des investissements publics : - logement social - hôpitaux - enseignement et formation - prestations sociales et allocations chômage.

Ces cadeaux d’ailleurs portent en grande partie sur l’IRPP (impôt sur le revenu), seul impôt vraiment progressif et donc socialement juste – alors qu’on aurait pu jouer sur la TVA. Ils s’accompagnent aussi de l’exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires, et la réduction ou suppression des cotisations sociales ce qui met en danger la protection sociale. On sape ainsi le principe de solidarité, on défait l’Etat social, en marche vers la marchandisation et l’individualisation de la société. De toute façon, la réduction des dépenses et du budget dans le PIB est toujours à l’ordre du jour.

Et alors même que les mesures favorables aux plus riches sont maintenues et renforcées : - maintien du CICE et des niches fiscales aux entreprises (alors qu’on a songé à supprimer celle sur les aides à domicile des personnes âgées) - refus de revenir sur la suppression de l’ISF - défiscalisation du capital par la « flat tax ». Exemple emblématique : le gouvernement baisse les budgets alloués au logement social, tout en refusant obstinément tout contrôle des prix dans l’immobilier et toute action forte en faveur de la construction, car il faut laisser faire la seule initiative privée.

Dans les faits, la baisse des impôts vise d’abord à acheter le silence des citoyen.ne.s pour faire passer les mesures néolibérales (sur les retraites, le chômage, le code du travail) et renvoyer l’investissement public et la couverture sociale à l’initiative privée (recherche, innovation... et même l’aide sociale à travers les CIS – contrats à impact social). Alors que la conjoncture (taux d’intérêt négatif => on s’enrichit en s’endettant !) permettrait à l’Etat de mener une politique forte d’investissement pour la transition écologique, l’enseignement, la formation et la recherche, la santé.

Dans notre secteur, le budget de l’Education nationale progresse de 2% (+ 4% pour les Armées et pour l’Intérieur), guère plus que l’inflation, de 51,68 Mds € à 52,72 Mds, ce qui tient à peine compte de la hausse « automatique » des salaires (le fameux GVT – glissement vieillesse technicité), et des nouvelles charges du ministère : la prise en charge des AESH et le financement du SNU – le service national. Avec ce qui reste, pourra-t-on financer le dédoublement des classes dans l’éducation prioritaire et le passage aux 24 élèves/classe de la GS maternelle au CE1 ? Là encore Pierre paiera pour Paul, les 10 000 postes nécessaires à l’enseignement primaire seront prélevés dans le second degré (la réforme du lycée est à cet égard bien pratique...). Quant à la revalorisation du métier d’enseignant tant promise, on verra plus tard !

Patrick Tarroux