Le rapport Villani / Torossian suscite un apparent brillant consensus, la méthode de Singapour triomphe au box-office pédagogique ; grâce à celle-ci la France va promptement retrouver sa place dans les classements PISA et autres pour les performances en mathématiques.
Pour autant, la traduction française de la méthode de Singapour (TFMS) ne correspond pas à la méthode réelle telle qu’appliquée réellement à Singapour : il y a des discordances pédagogiques (pratique du comptage-numérotage, enseignement de la soustraction en reculant sur la suite numérique...) et matérielles (place de la formation initiale et continue des professeurs).

Le point de départ c’est la chute des résultats et performances en maths intervenue après 1987, après la rupture inspirée par la psychologue américaine Rochel Gelman dans les méthodes d’apprentissage (principe du « comptage-numérotage » qui remettait en cause les principes initiés après 1947). Face à ce recul, changement de cap avec les programmes mis en place en 2015/16, qui reprennent la méthode d’avant 1986 cf travaux d’Elisabeth Spelke). Sauf que la TFMS, la méthode de Singapour telle que transposée en France, revient aux pratiques de 1986/87 (cf R. Brissiaud) et aux principes fortement critiqués de R. Gelman.

Dans les faits, la commission Villani s’est entourée de représentants d’officines traditionalistes proches de JM Blanquer (SLECC Savoir Lire Ecrire Compter Calculer ; GRIP Groupe de Réflexion Interdisciplinaire sur les Programmes) qui inquiètent sur les motivations profondes des changements pédagogiques, prônant un retour ’’aux bonnes vieilles méthodes’’.

Enfin, le rapport ne prévoit ni budget, ni plan réel de formation laissés à l’appréciation du ministre qui se contente de commenter que "les enjeux sont immatériels davantage que matériels"... De plus les travaux de la commission n’examine pas les autres systèmes performants en Europe, notamment en se focalisant sur une seule méthode dont on aura fait une promotion sans précédent.

PS : pour plus d’information voir les travaux de Rémi Brissiaud, chercheur en psychologie cognitive, spécialiste de l’apprentissage des mathématiques