Retour sur la fermeture du collège public Surcouf de Saint-Malo
Le 26 juillet dernier, le tribunal administratif confirmait la fermeture du Collège Surcouf pour la rentrée 2017-2018. La mixité sociale est le principal argument avancé par les autorités départementales pour justifier la fermeture d’un collège public. Ainsi, à Saint-Malo,
Surcouf a fermé ses portes parce que le collège était considéré comme l’établissement public le plus ségrégué avec 60.74% d’élèves issus de familles défavorisées contre 36.76% pour le collège Chateaubriand, 29.20% pour le collège Duguay-Trouin et 24.83% pour le collège Charcot. La répartition des élèves issus de Surcouf entre les trois autres collèges publics garantit-elle pour autant une répartition sociale plus équilibrée ? Rien n’est moins sûr. C’est sans compter sur la présence forte en Bretagne des établissements privés et sur le « zapping scolaire » des familles de plus en plus fréquent, surtout lorsque les décisions de fermeture ont lieu sans concertation avec les familles.
Les cloisons entre le réseau privé et public d’éducation sont en effet de moins en moins étanches et les familles n’hésitent plus à utiliser les possibilités offertes par chacun des deux réseaux de scolarisation. Le choix entre les deux ne repose plus sur des critères idéologiques mais bien sur les conditions supposées favorables à la réussite scolaire. Or les familles malouines semblent bien avoir fait le choix de fuir vers le privé. Il s’agit généralement de familles plutôt aisées inquiètes de voir arriver les élèves de Surcouf dans le collège où sont scolarisés leurs enfants, ou de parents qui cherchent à inscrire leurs enfants dans le collège privé plus proche du domicile pour limiter les coûts de transport. À la rentrée 2017-2018, les établissements publics comptent environ 5 élèves de plus par rapport à l’année précédente, en baisse. Et le privé 32 élèves en plus. Alors comment faire de la mixité sociale dans les établissements privés qui choisissent leurs élèves et accueillent en moyenne une population plus favorisée ?
Les trois collèges catholiques de SaintMalo scolarisent à peine 11.85% d’élèves d’origine défavorisée à Choisy, 18.48% au Sacré Cœur et 19.49% à Moka, bien en dessous des trois collèges publics. Et aucun engagement dans des dispositifs communs de mixité entre l’enseignement catholique et l’inspection académique n’est pris. Pire, le Conseil départemental finance l’agrandissement du collège catholique Sainte-Jeanne-d’Arc-Choisy comme s’il prenait acte du poids du privé à Saint Malo. Pour l’ancien collège Surcouf une « nouvelle vie » commence. Un bâtiment accueille désormais des associations comme les Secours populaire et catholique, Horizons nouveaux et Espérance Solidarité. Un deuxième bâtiment a été confié par la ville à Emeraude Habitation pour être réhabilité en logements. D’autres projets sont à l’étude pour le dernier espace disponible. L’avenir nous dira si le service public d’éducation est condamné à s’affaiblir face aux contraintes de gestion de flux et de moyens.
Redon : un réel projet de mixité sociale ?
Une petite Bretagne
Redon est une ville de 8000 habitants au milieu d’une vaste zone peu densément peuplée. C’est un bassin agricole et industriel. La population y est peu favorisée avec un nombre important de boursiers. Cette ville accueille trois collèges, deux publics sur les collines, Beaumont et Bellevue, et un collège privé au centreville, le Cleu-St-Joseph. Deux collèges se partagent la majorité des élèves : Beaumont (600 élèves) et Le Cleu (650). Le collège Bellevue, quant à lui, compte 450 élèves (ainsi que 60 élèves en section SEGPA). Ce collège construit dans une ex-ZUP accueillait les enfants des familles ouvrières dans les années 60. Ce collège a longtemps eu une image de « collège de banlieue », notamment dans l’accueil des populations immigrées pourtant fortement minoritaires. Cependant, ce quartier a vécu, de nombreuses barres d’immeubles ont été détruites, il y a quelques années, laissant place à des espaces verts. Aucun nouvel aménagement n’est venu remplacer ce vide. La population du quartier a fortement diminué.
Une réalisation de mixité difficile.
En 2016, la ministre Vallaud-Belkacem lance son appel à projet « mixité sociale ». Le Conseil Départemental se saisit de cette occasion pour lancer ce chantier pilote. Mais comment établir cette mixité ? Après quelques ratés, ce sera sur présentation de la déclaration de revenus des parents que l’Inspection affectera les élèves. L’objectif est de ramener les enfants des familles de catégories socioprofessionnelles plus favorisées vers le collège Bellevue.
Un bilan à faire
Le collège a accueilli 100% des élèves de son secteur, des dérogations d’entrée au collège Bellevue ont été refusées. Chaque établissement reçoit donc toujours les élèves de sa carte scolaire. Dans cette opération, l’image négative du collège Bellevue a été de nouveau exposée et renforcée sans qu’une réponse soit apportée aux difficultés sociales de notre recrutement. Malgré les demandes au CA du collège aux conseillers départementaux présents et les promesses de ceux-ci, aucun bilan à ce jour n’a été communiqué.
Analyse
Ce projet d’instaurer de la mixité sociale à Redon est sans doute une simple volonté de gérer au plus près les effectifs et les capacités d’accueil des locaux départementaux. Bellevue demeure toujours un établissement qui ne remplit pas ses capacités d’accueil pour la rentrée prochaine. Nous attendons toujours une réunion prévue depuis octobre avec les représentants des trois établissements (public et privé) de Redon pour, peut-être, avancer sur le sujet.
Article1 : Mixité dans le département et les collèges rennais
Article 2 : Plan accueil collégiens : projets du Conseil départemental
Article 3 : Ségrégation scolaire et politique de l’éducation
Article 4 : Point de vue des enseignant-es des secteurs concernés
Article 5 : Effectifs dans les collèges : le CD 35 renie ses propres travaux
Article 6 : Bilan des expérimentations « mixité sociale » du CD35
Article 7 : Resectorisation, mixité et 1er degré
Article 8 : Point de vue de parents d’élèves de l’APE de Chantepie
Article 9 : Le conseil départemental et la démocratie
Article 10 : Conclusion